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Sécurité des soins Retour d’expérience Témoignage
Publié le 18 septembre 2020 Modifié le 7 juin 2023
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Temps de lecture : 5 minutes

COVID-19 : Sophie VIOLET nous parle de son expérience au CH de Colmar

Sophie VIOLET, Consultante Senior chez Relyens est partie renforcer les équipes du CH de Colmar durant la crise sanitaire, en tant qu’infirmière anesthésiste. Revenons sur son expérience :

Sophie VIOLET
Consultante

Pourquoi as-tu choisi de partir aider durant cette crise sanitaire ?

« J’ai démarré dans le monde du travail en tant qu’infirmière puis infirmière anesthésiste jusqu’en 2000. A la suite d’une formation de cadre de santé, j’ai occupé des fonctions de manager comme Directrice des soins et de la qualité avant de rejoindre Neeria. Je n’avais donc pas pris en charge de patient de façon globale depuis près de 20 ans….

Mais vu la situation, j’ai voulu « donner un coup de main » et aussi me prouver que j’étais capable de me remettre dans le bain ! C’était un challenge pour moi et j’avais surtout besoin de contribuer à l’effort national.

J’ai beaucoup d’amis qui travaillent dans les hôpitaux. J’échangeais avec eux et me rendais compte que la situation devenait de plus en plus difficile. »

Comment et pourquoi es-tu partie au Centre hospitalier de Colmar ?

« Je me suis inscrite en tant que bénévole à la réserve sanitaire. J’ai été très rapidement contactée pour intervenir notamment à l’APHP mais on me demandait d’être active pour le lendemain et j’avais besoin de me remettre à niveau…

Le 17 avril, le centre de crise sanitaire de la DGS (direction générale de la santé) me contacte pour une mission du Centre Hospitalier de Colmar. Après un échange avec le Directeur des soins qui me propose une remise à niveau, je confirme ma volonté de m’engager. Après c’était parti !  Le 20 avril, départ de Lyon en jet privé avec 4 autres volontaires : 3 personnels soignant du CHU de Nice, détachés pour l’occasion, et 1 autre personne qui comme moi avait été infirmière avant de se reconvertir.

Pour l’anecdote, c’était la première fois que je montais dans un jet, une expérience originale dans ce contexte. Il faut savoir que les jets étaient mis à disposition par leurs propriétaires pour favoriser les déplacements des soignants vers les hôpitaux ».

Et ton installation à Colmar ?

« Nous étions attendus et tout était prévu ! Nous étions hébergés en résidence universitaire, dans des chambres d’étudiants ; il y a bien longtemps que cela ne m’était pas arrivé ! Le confort était assez rudimentaire mais nous étions situés à 5 mn de l’hôpital, ce qui est appréciable quand tu prends ton poste à 6h du matin. Et puis, nous étions tous au même étage, Il y avait une bonne ambiance, c’était très sympa ! ».

Comment s’est passée ta mission ?

« Je suis restée au Centre Hospitalier de Colmar durant 9 jours en réalisant des gardes de 8 heures. J’ai passé ma première journée en « doublure » pour me réapproprier les gestes infirmiers. Je me suis rendue compte que je n’avais rien perdu et le maniement des respirateurs et des moniteurs spécifiques n’avait plus de secret pour moi (le matériel est plus intuitif et ergonomique qu’il y a 20 ans).

Dès le lendemain, j’ai pu assurer un poste d’infirmier anesthésiste permettant ainsi de donner des repos à du personnel. Nous étions installés dans une salle de réveil réaménagée en service de réanimation pour l’occasion. Il s’agit d’une grande pièce où se trouvent tous les patients, il n’y a pas de chambre individuelle. L’équipe des soignants était constituée de personnels de différents services dont des volontaires comme moi. L’ambiance était particulière mais sympathique. Ma mission s’est très bien passée : intense, fatigante mais enrichissante. J’étais bien encadrée malgré la charge de travail et le stress lié au risque de contamination ».

Qu’est-ce qui a été le plus dur ?

« Ce qui était déroutant c’est de ne pas disposer de traitement identifié contre ce virus et d’être dans l’inconnu quant à l’efficacité des soins que j’administrais aux patients. Cela allait à l’encontre de mon identité professionnelle ».

Le plus dur ? Je dirais d’être habillée de la tête aux pieds, du matin au soir avec blouse, masque, visière et gants. On a chaud, on respire mal… La relation avec les patients s’en ressent : entre le masque et la visière, la communication non-verbale est complètement inhibée, on ne voit pas les sourires. Nous étions limités au strict minimum au niveau du toucher. On est caché derrière cet accoutrement et il est donc difficile d’apaiser les peurs des patients. Il y avait aussi la difficulté de la langue car certains patients ne parlaient qu’Alsacien.

Une autre difficulté c’était d’arriver à soulager les angoisses des familles sans qu’elles puissent venir voir leurs proches et sans qu’elles puissent leur parler car ils étaient en majorité inconscients. Il fallait trouver les bons mots, entre vérité et espoir… Seuls les patients en fin de vie avaient un droit de visite très limité dans le temps. Et dans le contexte de cette grande salle de réveil, il était difficile de préserver le calme et l’intimité des familles. Enfin, plus personnellement, j’étais loin de ma famille angoissée de me savoir en alsace en plein épicentre et en même temps fière de ce que je faisais dans ce contexte si particulier « .

Un mot pour la fin ?

« Si c’était à refaire, j’y retournerais sans hésiter. Il a fallu s’adapter rapidement, le travail était fatiguant physiquement mais aussi émotionnellement mais j’ai pu aider. J’ai été très touchée à la fin de ma mission par une infirmière avec qui je travaillais en binôme. A mon départ, elle m’a remis une bouteille de vin d’Alsace et m’a simplement dit « Merci », ce qui voulait tout dire. »

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